Une nouvelle courte inspirée d’un organe qui existe bel et bien chez nos amis de la poiscaille 😉
Une gigantesque vessie natatoire. Tom était le premier à avoir demandé ça depuis la démocratisation des altérations génétiques personnelles. Forcément, défrichant ainsi le terrain, il lui en coûta une belle somme. Qui plus est, afin de pouvoir obtenir une vessie natatoire adaptée à la masse humaine, et à sa masse en particulier, Tom dût accepter une augmentation notable de son tour de taille. Mais tout explorateur doit se montrer prêt à opérer des sacrifices afin de repousser les limites de l’expérience humaine, et Tom accepta. Il accepta tout.
Une fois équipé de l’organe tant désiré, et après quelques jours de repos postopératoire, le jeune homme fut invité à tester ses nouvelles capacités dans la piscine de l’institut. Cette toute première vessie natatoire humaine, conçue à partir des codes génétiques de différents poissons méditerranéens, devait permettre à Tom de choisir sa profondeur d’immersion à chaque fois qu’il serait plongé dans l’eau. Le terme vessie ne doit pas vous induire en erreur, il n’est pas question ici d’urine. Cet organe n’est qu’une poche de gaz dont on peut ajuster la densité afin de se mouvoir sur le plan vertical.
Tom, excité à l’idée de se mouvoir comme un poisson dans l’eau de manière littérale, s’exerçait déjà dans les vestiaires. Durant sa convalescence, il avait reçu les conseils d’un kinésithérapeute. Domaine nouveau pour tous les deux, ils avaient cherché ensemble à éveiller chez l’homme-poisson les sensations et commandes nerveuses propres à l’utilisation de la vessie. Il leur semblait avoir obtenu quelques résultats encourageants, mais rien ne pouvait valoir l’épreuve de l’eau.
Il fut convenu de procéder d’abord dans une de l’eau douce, car l’eau de mer compliquerait la plongée. C’est donc dans une piscine municipale que Tom se rendit avec son kiné et, avec l’assistance d’une maître-nageuse, ils mirent au point une série de tests, d’entraînements et d’épreuves visant à coloniser ce nouveau continent de l’expérience humaine.
La première session fut laborieuse. La seconde à peine moins. Mais dès la troisième rencontre entre ces aventuriers du corps génétiquement modifié, quelque chose se mit en branle : Tom eut un déclic lui permettant de mettre en œuvre tout ce qu’on lui avait appris.
On procéda rapidement à un test en bord de mer. Tom put enfin littéralement, selon l’expression, se sentir comme un poisson dans l’eau. Il fit malheureusement la rencontre d’Inès, génétiquement modifiée pour avoir une mâchoire et un appétit de requin.